hugo - puisque j'ai mis mes lèvres
puisque j’ai mis mes lèvres à ta coupe encore pleine
puisque j’ai dans tes mains posé mon front pâli
puisque j’ai pu sentir parfois la douce haleine
de ton âme, parfum dans l’ombre enseveli
puisqu’il me fut donné de t’entendre me dire
ces mots où se répand le coeur mystérieux
puisque j’ai vu pleurer, puisque j’ai vu sourire
ta bouche sur ma bouche et tes yeux sur mes yeux
puisque j’ai vu briller sur ma tête ravie
un rayon de ton astre, hélas voilé toujours
puisque j’ai vu tomber dans l’onde de ma vie
une feuille de rose arrachée à tes jours
je puis maintenant dire aux rapides années
passez ! passez toujours ! je n’ai plus à vieillir
allez-vous-en avec vos fleurs toutes fanées
j’ai dans l’âme une fleur que nul ne peut cueillir
votre aile en le heurtant ne fera rien répandre
du vase où je m’abreuve et que j’ai bien rempli
mon âme a plus de feu que vous n’avez de cendres
mon coeur a plus d’amour que vous n’avez d’oubli